Transmedia Hollywood : la créativité de l’industrie américaine des contenus à l’heure du transmedia
par Morgan Bouchet, publié le 3.05.2012
Le 6 avril dernier, du Transmedia lab participait au panel N°3 aux côtés de Denise Mann et d’. Organisé par UCLA (University of California, Los Angeles) et USC (University of Southern California) au sein de l’Annenberg Innovation Lab – USC à Los Angeles, cet événement était consacré cette année aux « Rethinking Creative Relations ».
Cela fait maintenant plusieurs années que USC et UCLA mènent ensemble des travaux sur l’évolution des medias à l’heure de la révolution digitale (journalisme, communication, création, storytelling,…) L’ambition de cette démarche : décrypter les tendances, évaluer les évolutions et risques potentiels mais aussi développer diverses solutions et technologies. Ainsi, ces deux universités sont devenues expertes des sujets pointus que sont la social TV, les réseaux sociaux, le transmedia et plus largement la communication digitale. C’est pour cette expertise reconnue que nous avons décidé de participer à ces travaux et de construire un partenariat durable entre Orange et l’Annenberg Innovation Lab de l’USC que nous vous avons annoncé dernièrement.
Avec un prisme mêlant créativité et technologie (là où le MIT, également incontournable, garde un focus « code ») et surtout jouant de sa proximité immédiate avec « Hollywood », les deux universités portées par deux figures emblématiques (Denise Mann et Henry Jenkins) se sont alliées depuis trois ans pour évangéliser, expliquer et préparer l’industrie à ce bouleversement des medias à la fois technologique, créatif et comportemental.
Devant un parterre de « media strategist », majors, producteurs, développeurs, opérateurs de services de contenus, scénaristes, agents, auteurs, chercheurs, d’étudiants mais aussi des corporations de scénaristes, j’ai eu la chance de partager notre vision européenne de ces bouleversements. Durant près de deux heures les échanges ont été rythmés autour d’un seul thème : « Creative Economies: Commercial vs. State-Based Models », soit le regard du reste du monde sur les enjeux et économies du transmedia/crossmedia.
A mes côtés, pour en parler, directrice de l’Universe Creation 101, , présidente de l’OCAD (Ontario College of Art and Design University), , l’ancien Vice President Media et Technologie de l’American Film Institute et enfin Jose Padilha, producteur brésilien.
LE MONDE DE LA CRÉATION DOIT-IL S’UNIR AVEC CELUI DU « CODE » ?
Devant être initialement modéré par Henry Jenkins le panel a été animé par , conseiller stratégique au sein de la Georgia Tech Institute for People and Technology (IPaT), qui se concentre sur le secteur du divertissement en identifiant les tendances technologiques émergentes et des sujets de recherche, pour développer des relations avec des grandes entreprises médiatiques.
La première session : Realigned Work-Worlds : Hollywood / Silicon Valley / Madison Avenue, était là pour donner le ton.
Nous entrons dans une période où le marketing et le contenu deviennent indivisibles. Les modèles marketing traditionnels vecteurs de saturation, sont de moins en moins pertinents et c’est d’autant plus le cas à l’heure des médias sociaux. Par ailleurs, l’arrivée d’une nouvelle génération de créateurs de contenu accompagnée de nouveaux outils technologiques pourrait contraindre Hollywood, la Silicon Valley et Madison Avenue à converger. Est-ce un signe de l’évolution culturelle de notre époque ? Certainement.
Nous vivons actuellement dans une période de transition, par conséquent, des problèmes de communication demeurent persistants. La loi SOPA pourrait d’ailleurs ne faire qu’accentuer la déconnexion entre les industries des médias, celles de la technologie et du numérique et de la communauté du cinéma, qui peinent à entretenir le dialogue. Pour rappel, aux États-Unis les lobbyistes des industries culturelles soutiennent des projets de loi pour renforcer les moyens de lutte contre le piratage. Quitte à autoriser des attaques en règle, en bloquant l’accès à des sites, ce qui affecte particulièrement les acteurs de la Silicon Valley. Les médias s’amusent régulièrement à titrer « Silicon Valley vs Hollywood » surtout depuis l’affaire MegaUpload.
Il est évident pour moi que le monde de la création devra tôt ou tard s’unir au monde du « code », mais la question méritait d’être posée – Qui est censé s’unir avec qui ? Qui doit faire le premier pas ? Est-ce à la Silicon Valley d’aller vers Hollywood ou l’inverse ? Sachant que le dernier « Story World » se tenait à San Francisco, est-ce un signe ?
Imaginons demain que The Voice soit écrit et pensé pour embarquer l’activité, les réactions, les commentaires ou encore les audiences des réseaux sociaux dans le concept même d’un programme de transmedia storytelling permettant ainsi de suivre une seule histoire (concept), celle écrite par son « producteur-créateur-développeur-gamedesigner ».
QUEL MODÈLE ÉCONOMIQUE POUR LES PROJETS TRANSMEDIA ?
Une question des plus importantes reste à éclaircir : comment les projets transmedia peuvent-ils exister ? Certains étant couteux, ils requièrent des modèles économiques solides, du moins suffisamment pour rentabiliser les investissements tout en ne parasitant pas l’expérience consommateur.
Pour cela il serait intéressant de définir plusieurs micro modèles économiques, tout simplement parce qu’avec une approche standardisée, il semble difficile de modéliser une source de revenue adaptée à la pluralité des concepts existants.
Il faudra donc être imaginatif pour trouver ces modèles, qui peuvent sortir de notre imaginaire ou tout simplement s’inspirer des modèles économiques existant dans d’autres domaines. Il peut s’agir de crowdfounding, voire de publicité. Cette dernière semble la plus pertinente tant elle se rapproche de l’idée même d’un projet transmedia, axé autour de l’engagement et de la créativité.
Les créateurs doivent donc embarquer des marques et leur permettre pourquoi pas de créer du contenu éditorial ou au moins d’influencer le contenu existant, un exercice de Brand Content. La marque jouerait ici un rôle d’éditeur, de financier, etc. (A distinguer du contenu de marque « Branded Content » )
L’EUROPE EXPRIME SA VISION ET SES AVANCÉES SUR LE MARCHE A HOLLYWOOD
Notre panel avait également pour objectif d’expliquer comment le transmedia se développe en dehors des États-Unis, en matière de création, de financement, de modèles économiques, de services, de technologies,….
Pour introduire Orange, le producteur Brésilien José Padilha a très justement cité la convergence entre les « réseaux » et les « contenus » illustrée avec le cas Televisa (Groupe TV mexicain qui a racheté l’opérateur de Télécom Mexicain en 2010 et dont le patron Carlos Slim, est l’homme le plus riche de la planète).
Du Brésil au Canada en passant par l’Australie ou la France, chacun y est allé de sa vision, de son schéma, confortant ainsi l’idée que nous ne vivons pas un phénomène de mode mais bien un vrai changement de paradigme pour l’industrie des media et que les modeles de financements en place vont bien devoir évoluer
Quelques enjeux et messages sont à retenir de cet évènement :
- réfléchir aux notions de plateformes et d’outils
- le rôle des technologies
- quelle créativité en termes de business (crowdfunding par ex…)
- le rôle de l’auteur dans la nouvelle chaine de valeur
- quelle position doit prendre Hollywood face à ces enjeux, face aux Pure players
notamment
Enfin, le point d’orgue du panel a été sans aucun doute la diffusion de cette vidéo par José Padhila : « How Brazil Is Reshaping the Futures of Entertainment » est une approche assez tranchée du futur des medias qui met en scène la vision d’Henry Jenkins.
A ce sujet Henry Jenkins, auteur de « Convergence culture » sera présent aux côtés du Transmedia lab d’Orange et de Sorbonne Nouvelle au centre G Pompidou le 25 mai prochain à partir de 19h pour partager avec nous sa vision du storytelling transmedia
PLUS D’INFOS SUR :
- Transmedia Hollywood :
- Annenberg Innovation Lab (USC) : Site internet de l’Annenberg Innovation Lab
LES PERSONNES DE TRANSMEDIA HOLLYWOOD A SUIVRE
Henry Jenkins ( et Blog)
Laurie Dean Baird ()
Christy Dena ( et Blog)
Sara Diamond ()
Nick DeMartino ( et Blog)