La BD et le transmedia font-ils la paire ?

par Maxime Gagneur, publié le 14.06.2012

Le transmedia a pour but de scénariser une histoire sur plusieurs médias (TV, Web, Réseaux Sociaux, IRL, Mobile,…), où chacun d’entre eux apporte un nouvel éclairage sur l’univers de par sa spécificité. Certains médias sont moins souvent activés que d’autres, c’est le cas notamment de la bande dessinée ! Heureusement, il y a quelques précurseurs dans cette nouvelle discipline attrayante et engageante… Des expériences très variées dans leur réalisation, dans leur intégration au sein de stratégies transmedia, dans la profondeur de leur narration… Petit aperçu par ordre chronologique.

 


DES DÉCLINAISONS INTELLIGENTES ET INTERACTIVES :

Au départ, certains auteurs ont décliné de façon intelligente leurs œuvres. L’apport, dans leurs versions numériques, d’éléments comme de la musique et un rythme de lecture différent du support papier, renouvellent l’atmosphère. L’histoire, l’expérience est appréhendée différemment par le lecteur. En ce sens, nous pouvons citer la déclinaison par son auteur, Matz, du « Tueur »

 

DES DETAILS DE L’UNIVERS D’ASSASSIN’S CREED RÉVÉLÉS GRÂCE AUX BD

Pour ce qui est d’expérience « nativement » transmedia, il y a l’expérience d’Ubisoft : Assassin’s Creed, licence de jeux vidéos populaires sur la dernière génération de console, très bien analysé dans ce blog. Outre un nombre croissant de volets différents (et un film), « Les Deux Royaumes », maison d’édition créée par Ubisoft, a sorti une série de bandes dessinées pour compléter l’univers. Par exemple, le premier tome « Desmond » raconte les raisons de l’emprisonnement du héros dans un laboratoire expérimental secret. Quant au second, « Aquilus », paru après Assassin’s Creed II, il nous mène à la poursuite d’un artefact aux propriétés prometteuses. Ces deux histoires, nous apportent de nouveaux éléments sur le monde du jeu, voire constituent le lien scénaristique entre deux opus vidéoludique. Cependant, ne pas les lire ne change rien à notre perception de l’histoire principale ressentie dans les jeux vidéos. Par contre, pour connaître les moindres détails du récit, il est fortement conseillé d’y jeter un œil !

 

ANKAMA : LA GROSSE ÉCURIE TRANSMEDIA

Ankama a construit son succès sur ses univers de jeux vidéos – vous aurez peut-être pensé aux célèbres « Dofus » et « Wakfu »-. Le premier est un jeu de rôle en ligne multijoueur. Les éditions Ankama ont prolongé l’expérience de jeu en déclinant l’univers thématique du Monde des Douze sur plusieurs plateformes et medias, dont notamment, la BD. « Pandala », telle est le nom de cette série, raconte l’histoire d’un personnage secondaire dont le village a été détruit ; « Pandala » étant le nom d’une île tirée du jeu Dofus.

Le deuxième jeu, « Wakfu », est le troisième titre d’Ankama après « Dofus » et « Dofus Arena ». Lui-même est un jeu de rôle multijoueur en ligne mais aussi un dessin animé. L’histoire se déroule plusieurs siècles après l’époque de Dofus, dans le même univers. De cet animé découle une série de bandes dessinées « Wakfu Heroes« . La narration est axée sur les aventures des grands héros de l’univers Wakfu. Écrit par TOT et Jean-David Morvan, et illustrée par Adrián, chaque tome apporte des éléments nouveaux à l’univers de la série animée en racontant l’histoire de personnages secondaires aperçus lors des différents épisodes. Ces ouvrages délivrent une nouvelle vision de l’univers. Les fans intéressés par tous les détails de ce projet ne peuvent qu’apprécier ces livres qui permettent de connaître en profondeur tous les personnages de Wakfu, aussi importants soient-ils.

 

« 3 SECONDES » : UNE OEUVRE, DEUX PERCEPTIONS !

Plus récemment, le livre de Marc-Antoine Mathieu, un pionnier dans l’exploitation des supports, a publié « 3 secondes« . Cet ouvrage a été commercialisé classiquement sous forme de bande dessinée, et un mot de passe à l’intérieur de celui-ci vous permettait de vivre une expérience en ligne. Le format est la conséquence d’une réflexion web. Toutes les cases de l’album papier sont de la même dimension pour permettre une mise forme propre à Internet. L’objet numérique est complémentaire à la BD, du fait que sa lecture crée une sorte de vertige presque physique, alors que l’œuvre principale propose un regard plus contenu, plus restrictif.

 

LA TELEPHATIE PAR QR CODES !

Dans un tout autre genre, mais toujours avec comme support principal la bande dessinée, Jérôme D’Aviau et Ninon proposent un livre agrémenté de QR Codes : « Samedi Soir, Dimanche Matin » aux éditions bookBéo, où deux lectures sont possibles. L’histoire ?, elle semble si simple : il, elle se rencontrent au bord de la piste de danse, une rencontre somme toute banale, que vous découvrirez lors de votre première lecture, strictement papier. La deuxième consiste à reprendre l’ouvrage en se munissant d’un smartphone pour scanner les symboles… vous pourrez ainsi épier les pensées « secrètes » des personnages durant leurs conversations. Un procédé transmedia plutôt nouveau pour la BD en France : la découverte d’un univers parallèle suite à une seconde lecture.

 

LA BD VIDÉO D’ANTIGONE 34

Enfin, depuis mars 2012, France 2 diffuse des épisodes à la télévision de la série « Antigone 34″. Pour la petite histoire, le nom de la série fait référence à un commissariat situé à Montpellier dans l’Hérault (34). L’expérience, elle aussi en partie conçue par Matz, est dispatchée sur plusieurs médias, à savoir le site de France 2, une application iPad, les réseaux sociaux (, Twitter et ) et le blog de la ville de Montpellier. L’originalité provient de la diffusion d’une BD sur la fameuse plateforme de partage vidéo de Google. Des planches défilant racontent les dernières heures d’Élodie Carlier, dont le meurtre est le point de départ de la série. Cette expérience a pour but de renouveler la série policière.

Le transmedia permet d’utiliser de nombreux canaux de communication afin de rendre une expérience la plus attractive et interactive possible. La bande dessinée en France s’invite de plus en plus dans la danse… Ce média a un fort potentiel pour les réalisateurs de projet, car selon Matz, il est : « un des rares médias qui reste un peu protégé du politiquement correct ». Cependant si nous voyons encore peu d’expérience utilisant ce moyen de diffusion, c’est peut-être dû au temps de conception, réalisation et production de ce dernier. Concevoir une bande dessinée, demande du temps en amont. Il faut de plus s’assurer que la récit transmedia durera assez longtemps pour pouvoir intégrer la parution de ces œuvres dans vos plannings. Ses liens avec le numérique sont de plus en plus évidents, ce qui permet de faire preuve d’originalité quant à la façon de l’exploiter. Enfin, le foisonnement de jeunes auteurs talentueux laisse espérer un intérêt croissant pour les projets transmedia… Une brique à bien réfléchir avant de l’intégrer à vos plannings, mais d’une grande richesse !

L’agence Bigger Than Fiction collabore actuellement à la création de la plateforme EspritBD, où est exploré le potentiel de la BD numérique. Vous trouverez régulièrement de l’actualité sur les liens entre transmedia et le neuvième art sur le blog d’EspritBD.

 

auteur Maxime Gagneur

Fan du monde de l'imaginaire (jeu-vidéo, série TV, mangas) les pratiques transmedia me passionnent. Je scrute depuis longtemps la toile à la recherche des meilleures expériences en la matière. Actuellement étudiant en Master scénarisation de contenus audiovisuels multisupports à Lyon, j’ai rejoint l’équipe de Bigger Than Fiction en Avril 2012 !